Nous avons vu et entendu dans nos Journées d’étude à quel point la poupée ou la marionnette2 possède des qualités thérapeutiques : sans en être détruite, sa forme humaine
peut accueillir des projections haineuses et amoureuses, servir d’exutoire, subir des châtiments cathartiques et substitutifs à la place d’un personnage réel, faire semblant et permettre de jouer de la ressemblance, aider au transfert, dans le sens fort du terme, de la scène psychique vers la scène théâtrale, exprimer et faire se résorber des conflits inconscients … C’est à Winnicott que nous devons, toujours, la théorisation la plus stimulante sur l’aire de jeu qu’ouvre l’enfant avec sa poupée, le jeu du « comme si » étant le garant d’une zone intermédiaire, indispensable à la vie psychique et constitutive de la transitionnalité.
Une variante particulièrement intéressante des fonctions de la poupée nous est offerte par le peintre et écrivain expressionniste Oskar Kokoschka, qui a éprouvé un tel amour pour Alma Mahler que, trois ans après leur rupture catastrophique en 1914, il a fait fabriquer par la couturière munichoise Hermine Moos un manne- quin, en tout part égal au modèle. Ce projet est-il le projet intime d’un amoureux éconduit qui cherche désespérément à effacer l’ombre que l’objet perdu continue à jeter sur son moi mélancolique, une tentative aussi bien d’auto-guérison que d’auto-dérision, la mise en évidence, la matérialisation même du symptôme de Kokoschka ? Ou s’agit-il d’un projet artistique audacieux qui doit autant à la modernité qu’aux mythes et pratiques des plus ancestrales visant la création d’un corps plus vrai que nature, mimant celle-ci au point de s’y méprendre, l’épousant pour mieux la dépasser ? Probablement la poupée de Kokoschka aura été un mélange baroque de ces deux projets.
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Auteur |
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Silke Schauder |
Référence |
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RA002-04 Illusion, apparence, transparence Journées d’Automne 2011 |
Catégories |
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Art Peinture Poésie Psychopathologie de l’expression |