Le ravissement entre folie et création

La figure du ravissement apparaît de façon explicite dans l’œuvre de Marguerite Duras dans le titre d’un roman paru en 1964 : Le ravissement de Lol V Stein. À partir d’une communauté affective, entre le personnage de Lol et M Duras autour d’un moment de mélancolisation, une analogie apparaît entre le créateur et son personnage à cette différence près que chez le créateur il s’agit de renouer avec un fond par cette pensée « mélancolique » qui n’a a priori aucun caractère pathologique dans la mesure où la pensée serait à l’origine mélancolique tandis que le personnage nous donnerait à voir le versant pathologique de la mélancolie.
Dés lors, l’histoire de Loi, qui est celle d’un ravissement amoureux, pourra se lire comme celle de l’écrivain quand l’œuvre l’envahit et le ravit à lui-même et devenir l’histoire du premier instant de l’écriture dans ce moment très particulier où la pensée s’abîme.
La figure du ravissement se présente dans l’œuvre comme la répétition de l’effacement de Loi dans l’écriture qu’elle suscite chez M. Duras, effacement dont l’écrivain prendra le risque de réactiver la trace, dans cette « attente de rien » auquel il se soumet en « faisant la solitude ».
À partir de ce rien, M Duras va tenter d’écrire « l’histoire de (sa) vie qui n’existe pas» dans une sorte de nécessité mortelle où « écrire (dit-elle) c’est se tuer mais pas par la mort». Ce serait plutôt se tuer par un acharnement désespéré à écrire la ruine de la représentation de ces « choses détruites par Dieu au cours de la nuit ».

Auteur
Suzanne Ferrières Pestureau
Référence
RA003-21
Ravissement
Journées d’Automne 2012
Catégories
Art
Littérature
Psychanalyse