Paumes vers le ciel : analyse des attitudes corporelles lors du ravissement

Autant à parcourir son iconographie savante en peinture ou sculpture que dans sa représentation populaire, comme chez le personnage du Ravi dans la tradition provençale, l’état de ravissement se traduit d’abord et pour l’essentiel par une pose corporelle d’une subtile cohérence unanime où, dans la composition, une place et un rôle fondamentaux sont réservés à la présence et l’agencement des mains : à l’embouchure de bras souvent fléchis au pli du coude, elles s’entrouvrent, paumes à la conquête d’une élévation et d’un «ciel », dont elles sollicitent l’agrément d’honorables accointances sinon d’une admission, auréolées d’une ferveur d’imploration, d’acceptation et de douceur mêlées.
En écho à une approche stylistique de quelques-unes de ces figures allégoriques promises au sort rare et enviable d’une béatitude accomplie (saint Paul et sainte Marie-Madeleine), contrastées par leur sublime inversion dans La Conversion de saint Paul du Caravage, audacieuse mise en scène picturale et culbute acrobatique des plus prosaïques sur un chemin de Damas où viennent coïncider l’illumination originelle d’une spectaculaire transmutation et l’annonce prémonitoire de son apothéose, nous essayerons d’indiquer quelques voies d’une compréhension psychologique des intentions et aspirations, intimement humaines bien plus que strictement religieuses, dont ces gestes hiératiques cisèlent les piliers.
Sans aller jusqu’à se laisser emporter ni exalter au quotidien par les exacerbations physiques ou sensitives de tels « enthousiasmes », au sens profane comme étymologique du terme, il conviendra d’examiner si cette contenance ne pourrait pas aussi s’accorder avec une capacité de réceptivité clinique, privée de laquelle une démarche et une destinée, du praticien comme du patient, perdraient beaucoup de leur saveur et de leur sens.

Auteur
Jean-Marie Barthélémy
Référence
RA003-09
Ravissement
Journées d’Automne 2012
Catégories
Phénoménologie
Peinture