« Dehors, toujours au centre »

« Comment dire, en parlant, ce qui est extérieur à la parole ? »

Le poète André du Bouchet, auteur de ce vers « Dehors, toujours au centre », n’est pas un philosophe, mais il oblige son lecteur à entrer en philosophie. En particulier, il nous interroge sur la frontière, sur la faille emblématique entre langue et parole. Comment songerait-on à inventer une langue si on ne parlait déjà ? La parole serait antérieure à la langue, et l’homme ne parle pas, comme dit Lacan, parce que le symbole l’a fait homme ; il parle parce qu’il est ouvert au monde, et que le « dire » est une façon de convoquer ce à quoi nous avons ouverture. La réalité se présente de deux façons : il y a celle que la parole dit quand la langue parle, et d’autre part celle qui se rencontre dans l’expérience sensible, visuelle, tactile.
On dit généralement que la langue est au fondement de la parole, mais le linguiste Gustave Guillaume remarque qu’il y a toujours une rupture entre la langue et la parole. Il ne s’agit pas de trancher définitivement mais de montrer que la poésie peut nous aider à repenser profondément le rapport à la frontière puisqu’elle nous renvoie au cœur de l’abyssale question du langage humain. La poésie serait alors « au chevet » de l’existence en abolissant momentanément la faille entre la langue et la parole :
« Il s’agit, par le mot, d’être en rapport un instant avec ce qui est en dehors du mot. »
Frontière qui trouve un écho dans le drame constitutif de l’existence humaine : celui d’une séparation que l’homme éprouve entre la réalité du monde extérieur, dont l’expérience lui est imposée et qui n’est qu’intersubjectivement contrôlable, et la réalité d’un monde intérieur dont il est la mesure.

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Auteur
Bernard Rigaud
Référence
RA021-02
Frontières
Journées de Automne 2023
Catégories
Philosophie
Psychanalyse
Poésie