L’apparence, illusion de soi. La transparence, illusion de l’autre


Le psychique : illusion ou réalité

Il n’y a de réalité que psychique à savoir que notre perception de soi et de l’autre dans sa radicale singularité est le propre de chaque être humain. Mais cette perception n’est pas une donnée
de naissance et il ne suffit pas pour un humain de naître pour être. En effet, le nouveau-né, s’il est chargé à sa naissance de sensations, est pratiquement dépourvu de représentations. Il a besoin de construire ses perceptions de soi et de l’autre et cela à travers ses interactions précoces avec ses parents pour qui, heureusement, il est un être à part entière, porteur d’une histoire et d’un avenir.
Le nouveau-né dans la construction de sa réalité est amené à franchir trois étapes. La première, c’est la construction de son corps propre qui s’achève en général à dix-huit mois et signe sa majorité psychique. La deuxième, c’est la construction de son espace propre et l’espace est vital pour consolider le corps ; une étape qui se déroule entre dix-huit mois et six ans, permettant à l’enfant d’opérer sa séparation avec son espace familial et l’accès à l’espace scolaire et social. La troisième étape, c’est l’accès à la dimension d’une trace où l’enfant en C.P. apprend à lire et à écrire. L’écriture permet au corps de s’émanciper, non seulement dans l’espace, mais aussi dans le temps.
Dans ce chantier, le nouveau né est un bâtisseur penseur qui est constamment aux prises avec le réel de ses sensations et le propre d’un penseur, c’est sa créativité et non son dogmatisme. C’est ainsi que ce nouveau-né forge en acte des concepts qui sont des outils pratiques pour sa propre construction tels que les espaces transitionnels nécessaires pour la construction de son corps, l’espace psychique interne déterminant pour l’accès à son espace propre et, pour terminer, la trace dessin et écriture, qui est une dimension nécessaire pour accéder à une conscience valable de soi et de l’autre.
Malheureusement, cette construction ne se déroule pas comme un fleuve tranquille et souvent la défaillance des systèmes de représentation des parents conduit l’enfant à trébucher dans sa construction au point parfois d’un blocage total ou partiel de son développement et au final une perception déformée de soi et de l’autre. Mais cette illusion de soi et de l’autre est ce qui sauve nos apparences et détermine nos transparences au point que cette illusion pour un humain est bien une réalité qui génère à son tour d’autres réalités. Bien entendu, l’illusion ne tient pas à l’épreuve du réel, à l’épreuve de l’autre et notre système d’apparence et de transparence relève d’un semblant qui risque de voler en éclat générant angoisse, chute et impossibilité d’une trace.

Auteur
Youssef Mourtada
Référence
RA002-17
Illusion, apparence, transparence
Journées d’Automne 2011
Catégories
Dessin
Écriture
Enfance
Phénoménologie
Psychanalyse