Du sujet de l’image à l’image du sujet

Comment s’esquisse, se ponctue et se conclut le mouvement propre à la creation de photographies dans un contexte de soins.
Afin de restituer une expérience, celle d’une médiation thérapeutique par la photographie en psychiatrie adulte, j’utiliserai une métaphore en évoquant deux séries de photographies qui ont porté ma réflexion tout au long de l’année 2013.
Tout d’abord les Théâtres d’Hiroshi Sugimoto (1978} : pour rappel, ce photographe fait une photographie unique d’un film pro-jeté pendant deux heures. L’obturateur s’ouvre au début du film et ne se referme qu’à la fin. L’accumulation de ces milliers d’images (24 images par seconde), est inenregistrable, irreprésentable et produit alors un écran blanc. Les spectateurs présents dans la salle ont disparu. Cet écran blanc est une illustration de ce que produit l’en trop chez le sujet, un excès, un en trop inélaborable qui fait symptôme, un symptôme qui ne remplit pas son rôle de compromis et maintient le sujet dans la souffrance. C’est celle que chaque patient apporte à l’hôpital de jour T. L .. Alors comment autrement dire? Comment donner forme à l’en-trop, à l’excès, d’une façon qui soit moins symptomatique?
Pour répondre à cette question j’évoquerai Les {crans sensibles, d’Alain Fleischer (1996). Cette photo unique est elle aussi réalisée à partir d’un film projeté dans une salle de cinéma où sont également présents des spectateurs. Cette fois la projection ne se fait pas sur un écran mais directement sur une feuille de papier argentique de 5x3m. A la fin de la projection, des assistants la badigeonnent de liquide révélateur pour faire apparaître la photographie. Pour obtenir cette image Fleischer va jouer sur deux éléments : la durée de l’exposition, dix minutes, et la surface de projection, une grande feuille de papier photo. Le dispositif est calculé pour que ce film projeté laisse une trace, une nouvelle trace, une mémoire non conforme au film projeté.

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