Transparence et opacité comme lieux du délitement de l’image du corps
ans le champ de la psychiatrie classique, les termes tels que automatisme mental, vol de pensée, délire d’influence ont tenté de décliner les diverses expressions du phénomène de l’hallucination. Au cours de ces manifestations cliniques, la pensée et le corps deviennent transparents au regard de l’autre, introduisant par là le délitement des coordonnées de l’image du corps en tant qu’image unifiée et fermée sur elle-même.
Néanmoins, si la thématique de la transparence dite mentale constitue dans le champ de la psychiatrie classique une expérience qui donne à voir et à entendre le rapport étrange et inquiétant du sujet à l’image du corps au moment précis où celle-ci se voit morcelée, perméable, diaphane, en revanche dans nos sociétés contemporaines la transparence est érigée en idéal.
Traçabilité, géolocalisation, omnivoyance, vidéosurveillance, autant de modalités d’une extension du domaine du regard qui accompagnent le discours de la science et qui soutiennent l’idée que tout peut être vu et surtout que tout doit être vu !
Ce qui constitue aujourd’hui un réel changement dans le monde contemporain consiste dans le fait que le progrès de la science et de la médecine donne l’illusion que tout voir puisse être possible.
À titre d’exemple, j’évoquerai les chercheurs japonais de l’institut de biologie des amphibiens de l’université de Hiroshima, qui ont trouvé le moyen d’observer l’intérieur d’une grenouille sans la disséquer, sans intervenir d’une quelconque manière invasive et sans même la passer aux rayons X, ou par tout autre dispositif ayant trait à l’imagerie médicale. Ce qui s’est passé : ils ont rendu la peau de la grenouille transparente, et selon l’expression de Gérard Wajcman, cette petite grenouille incarne dorénavant à elle seule « l’apocalypse du visible ». Or, une telle intrusion par le regard constitue un franchissement sans précédent dans l’histoire de l’humanité, un franchissement concernant les limites du visible, voire de l’intime.
Dans la clinique, transparence et opacité cristallisent l’introduction des hallucinations visuelles au moment où se défait le rapport pacifié et humanisé à l’image du corps.
Madame L. ne reconnaît plus son mari, elle explique que cet homme qui prétend être son mari n’est que le sosie de celui-ci. «Ce sont des usurpateurs d’identité qui sont à l’origine de ce changement,» précise-t-elle.
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Auteur |
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Angélique Christaki |
Référence |
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RA002-15 Illusion, apparence, transparence Journées d’Automne 2011 |
Catégories |
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Art Cas clinique |