La mélancolie de Dürer

LES SECRETS
A LA RECHERCHE DES SOURCES

La recherche des sources, de l’Antiquité à la Renaissance, a été menée par Panofsky et Saxl avec un souci de documentation soutenu par une vaste érudition. Ainsi ont-ils suivi l’évolution du concept de mélancolie selon les optiques populaire, médicale, philosophique, astrologique, mythologique. théologique, souvent intriquées parfois opposées. Leur étude, apparemment exhaustive, n’a cependant découragé ni historiens d’art, ni herméneutes de tous horizons qui ne cessent d’interroger la mystérieuse gravure soit pour proposer une explication globale, soit pour s’interroger sur tel ou tel élément. C’est un survol de ces tentatives qui est proposé ici.
La conception médicale de la mélancolie, qui prévaut au XVe siècle, reflète la doctrine des tempéraments (fig n » I), alors régnante. Chaque tempérament est déterminé par la prédominance dune humeur basale. Le mélancolique est dominé par la bile noire et la mélancolie est considérée comme la moins noble des quatre complexions.
Cette représentation négative de la mélancolie correspond aussi à la conception populaire, et elle est diffusée dans des calendriers illustrés, des “ fliegende Blatter « , des gravures sur bois montrant par exemple un homme affalé sur une table ou une femme délaissant son rouet.
Cette conception médicale de la doctrine des tempéraments est intimement liée aux conceptions astrologiques.
La bile noire, humeur de la mélancolie, produite par la rate (spleen) est subordonnée à Saturne, astre le plus élevé et le plus lent, sombre et lourd, et c’est le tempérament mélancolique que Verlaine évoque dans ses poèmes saturniens. Saturne est la planète des agriculteurs et des croque-morts, des tailleurs de pierre, des charpentiers, des menuisiers, des alchimistes, des savants, des ermites et de tous les contemplatifs.

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