Aspects psychologiques de la peinture contemporaine « naïve » au Maroc

Le monde musulman d’Occident a, jusqu’il y a peu de temps, presque totalement ignoré la peinture comme moyen d’expression, mis à part frises et panneaux décoratifs abstraits, effectués la plupart du temps avec d’autres moyens que ceux de la peinture à proprement parler, et mise à part la calligraphie. La situation du Maroc est en ceci extrême, et très différente de celle de la Turquie ou des pays persans. Le Protectorat a certes familiarisé certains milieux marocains à des tableaux de Casbah ou de coucher de soleil, ou à des représentations de fantasia ou de Marocaines allant puiser de l’eau au puits, tableaux faits évidemment par des Européens ; mais de là à une peinture marocaine véritable, il y avait un abîme. Celui-ci a été franchi, et ce n’est probablement pas une coïncidence à peu près au moment de l’indépendance. Entre 1956 et 1960, on assiste en effet à une éclosion de la peinture marocaine qui, depuis, n’a cessé de s’affirmer.
On y décèle, du premier coup d’œil, deux catégories différentes : d’une part les peintres qualifiés de naïfs et, d’autre part, ceux dont les œuvres se rattachent aux courants artistiques internationaux actuels. Si les chefs de file de cette seconde catégorie ont tous fait des séjours prolongés en Europe, les « naïfs », en revanche, n’ont générale: ment guère quitté le Maroc. Inutile peut-être d’ajouter que l’on ne rencontre qu’exceptionnellement, dans une même maison, des tableaux « naïfs » à côté de tableaux « progressistes » et, qu’au niveau des créateurs, à plus forte raison, l’entente laisse souvent à désirer. Mais cette situation, à première vue claire, s’avère ambiguë du fait que l’on observe chez quelques jeunes peintres, fils ou époux de femmes-peintres naïves, la volonté de « faire du moderne » et le désir d’être reconnus par les progressistes affirmés.

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