Du ravissement au simulacre

Nous considérons, à la suite d’auteurs comme Jean Laplanche ou René Roussillon, que l’adolescence est avant tout une période caractérisée par le surgissement de la sexualité adulte. Celle-ci est à l’origine d’une résurgence de certains messages énigmatiques qui, reçus dans l’enfance, restés en latence, remaniés par la puberté et réactivés par les pulsions, sont désormais en attente d’un nouveau traitement psychique.
De ce fait, l’ensemble de l’organisation de l’âme en sera modifiée ainsi que les rapports que le sujet entretient avec le processus de symbolisation. Ainsi, tandis que l’enfant symbolise ce qu’il ne peut accomplir, l’adolescent, lui, passe par l’acte, par la mise en acte — ce qui est tout autre chose, on en conviendra aisément, que le passage à l’acte — pour symboliser.
Il s’agira donc pour l’adolescent de produire des actes de symbolisation à l’origine de modifications du moi et de ses rapports tant avec les autres instances qu’avec les objets. L’adolescence est ce temps, nous dit René Roussillon, du « jouer pour de vrai » et non du « jouer à la place de vivre ». Soit, mais c’est un « vrai » qui lorgne tout de même du côté du faux-semblant. Dans cette perspective, le théâtre apparaît comme l’une des voies royales de la symbolisation à l’adolescence. Le simulacre théâtral évite le ravissement du sujet par lui-même, c’est-à-dire le rapt du sujet par une pulsion qui ne trouverait d’issue que dans la mise à mort de la pensée, dans la décharge à tout prix. L’illusion scénique retrouve ainsi le chemin de la transitionnalité en procurant à l’adolescent les moyens d’expression verbaux et infra-verbaux qui sont alors au service d’une mise en tension des problématiques de vie et de mort. Nous nous proposons ici d’illustrer ce propos, à partir d’un descriptif de notre cadre de travail, d’un bref exposé de notre pratique (très proche de la pratique psychodramatique) et d’exemples cliniques.

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