Créations en psychiatrie : une existence temporelle à part

Ces objets déposés dans des asiles — asile que l’on entend dans sa définition la plus pleine et exonéré de l’imaginaire claustral qu’il recouvre, l’asile comme refuge qui fait repère en période d’exil psychique, l’asile comme lieu de dépôt de soi — font figures d’un présent qui ne passe pas.
Parmi les créateurs en milieu psychiatrique, ceux de l’Art Brut font date et ce présent incessamment actuel initie bien souvent le geste artistique des créateurs. Cette permanente actualité du présent est celle dans laquelle vivent les amours toujours naissantes et qui ne cessent de fleurir l’œuvre d’Aloïse ; il est celui de l’impossibilité de la perte vécue par la créatrice de la robe de Bonneval dont l’idée d’une retrouvaille avec son mari défunt prend corps dans la réalisation de son ouvrage textile ; il est celui du syncrétisme esthétique et psychique vécu dans le délire de certains auteurs.
Cette actualité du présent pathologique fait des productions d’Art Brut des créations à l’œuvre, dont la monstration de l’objet créé les arrache à leur processus de réalisation jamais totalement clos sur lui-même plutôt que de créations mises en œuvre, c’est-à-dire pensées pour devenir œuvre exposée, adressée relevant à la fois d’un propos intellectualisé de l’artiste et ouverte au champ discursif de la critique.
Cette impossible clôture temporelle rend d’autant plus indéfinissable la qualité de l’objet créé et la manière de se saisir de son existence, en effet, quel espace d’accueil, quel champ de visibilité pour des objets hors-temps ? Notre réflexion sera parcourue d’œuvres issues de la Collection de Dubuffet mais également d’œuvres issues d’ateliers d’art-thérapie afin d’entrevoir la création en milieu psychiatrique sur un temps long et renouvelé.

Pour lire le texte complet s’inscrire ou se connecter