Le cahier de Péhache

Mais à présent, le fils de Fortimbras. d’un naturel ardent non assagi par l’expérience, a racolé de-ci, de-là, sur les marches de la Norvège, une bande de crève-la-faim pour nourrir quelque entreprise qui aurait de l’estomac.
Hamlet. Acte I. Sc. I, trad. A. Gide
Et tout cela est une conséquence de la malnutrition.
H. Miller
Mais ceci n’est sans doute dû qu’à la phagomanie qui élargit les tendons des pommettes et recouvre les tempes de protubérances. de bosses, de tumuli et de chicots.
Lawrence Durrell

Certes, sauf pour les parents d’Henri, modestes ouvriers d’origine italienne qui accordaient à l’étrangeté de leur fils une signification finalement rassurante (tant le jugement populaire gratifie volontiers et parfois de façon hâtive certains goûts et certaines vocations d’une aura de discrète folie ), renforçant leur conviction et aussi leur inquiétude d’avoir donné le jour à de la graine d’artiste, il était notoire, de l’avis même de scs professeurs et aux yeux de scs camarades, que l’adolescent se comportait de manière insolite. Conviction flatteuse pour de simples travailleurs immigrés capables, tout aussi bien que des familles aisées, de faire accéder leur enfant a l’univers envié de la culture et des arts, inquiétude inavouée à la pensée que la gêne matérielle qui les avait toujours talonnés, pourrait fort bien poursuivre oc fils doué pour le dessin, s’il choisissait cette carrière laquelle, cela est bien connu, nourrit rarement son homme.
Aussi, inspirés par une crainte qui sc voulait prudence, avaient-ils insiste auprès de leur fils Henri, après son succès au baccalauréat, afin qu’il renonce à la peinture, qu’il s’inscrive à un I.U.T. et s’oriente vers un métier sûr, susceptible de lui assurer une promotion sociale à laquelle ils ne pouvaient pour eux-même prétendre, et de lui permettre de manger tous les jours à sa faim : par exemple, un emploi de fonctionnaire dans les bureaux d’une administration.

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