Quand la logique fait front

Mémoires d’une aliénée (1883), Hersilie Rouy (1814-1881)

« Vous êtes Hersilie Rouy ?
— Vous le dites ! »

En fait, question cruciale, car c’est le nom de Mlle Chevalier qui va poursuivre Hersilie, malgré ses protestations, tout au long de son hospitalisation de treize années. Plus elle proteste, plus on l’enferme. Pour insoumission. Elle est cohérente ? Folie lucide ! Logique implacable, exaspérante ? Folie raisonnante !
Elle insiste, ne lâche rien, et elle écrit. Sans relâche. On tente en vain d’empêcher « cette femme méchante et écrivassière » de faire passer ses appels dénonçant son internement abusif — jusqu’à boucher sa fenêtre, ne lui laissant pour encre que son propre sang.
« Si je n’avais pas pu écrire, […] je serais morte ou devenue folle. »
L’écriture est sobre, élégante, factuelle. Véritable tour de France des pratiques psychiatriques, ses mémoires en sont un réquisitoire dont la presse se saisit. Tragique et rocambolesque, l’affaire Rouy sera invoquée lors de la révision de la loi de 1838. S’y cache pourtant le délire d’Hersilie qui obéit à une autre logique, non moins résistante.
La réparation financière des vices de forme de son internement, reconnu abusif de ce fait, n’est pas pour Hersilie la reconnaissance « qu’elle n’est pas folle ».
Elle est morte au moment où elle allait peut-être engager le vrai combat : mettre fin à la discrimination qui frappait les enfants adultérins. La loi le fit… en 2001.

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Auteur

Béatrice Chemama-Steiner

Référence
RA020-07
Résistance
Journées de Printemps 2023
Catégories
Psychiatrie
Histoire
Psychopathologie de l’expression
Écriture
Cas clinique